Notice
Auteur(s) | Gaël CARTRON |
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Date de publication | 2021 |
Titre complet de la publication | Charmont-Sous-Barbuise (10) Rue Du Moulin Chaudron, Phase 1 |
Type de publication | Rapport |
Éditeur | Éveha |
Langue du document | français |
Résumé | Les résultats d’un diagnostic réalisé en 2017 par G. Verbrugghe (Inrap) à Charmont-sous-Barbuise (Aube), le long de la rue du Moulin Chaudron, ont motivé la prescription d’une fouille archéologique sur la quasi-intégralité de cette parcelle de 1,90 m2. L’opération, qui doit se dérouler préalablement à la création d’un lotissement, a été scindée en deux phases distinctes. La première intervention, qui a eu lieu en 2019, concerne une emprise de 6000 m2 en forme de L, localisée immédiatement à l’ouest du cours actuel de la Barbuise, petit affluent de l’Aube. La quasi- totalité des 429 structures anthropiques appréhendées à cette occasion s’ouvrent en surface du substrat, à une profondeur généralement très faible (0,41 m en moyenne). Cinq périodes au minimum ont pu être discernées au terme de cette opération. Les premières traces de l’implantation humaine, qui appartiennent probablement au Néolithique ou à l’âge du Bronze, sont représentées par cinq fosses de plan oblong (2,35-2,60 x 0,95-1,50 m), dont le profil en « V » ou en « Y » a pu être apprécié sur une hauteur comprise entre 1,17 et 1,47 m. L’occupation suivante est matérialisée par deux sépultures séparées par un faible intervalle (0,75 m), qui ont été découvertes près de la berme orientale de l’emprise, à quelques dizaines de mètres de la Barbuise. Il s’agit dans un cas d’une crémation dans un contenant en céramique, dans l’autre d’une inhumation très perturbée installée dans une fosse rectangulaire (2,13 x 0,82 m). Les fourchettes chronologiques fournies par des analyses au radiocarbone sur les os humains concordent parfaitement avec les résultats obtenus après examen du mobilier céramique, nous permettant de placer avec sûreté ces tombes au Bronze final. La fosse la plus imposante identifiée au cours de cette opération (3,60 x 3,25 m), située 28 m plus au sud, correspond par ailleurs à une structure d’extraction au sein de laquelle trois lobes jointifs et mitoyens ont pu être discernés. Ce creusement de 0,68 m de profondeur au maximum a manifestement été abandonné au Hallstatt C d’après le matériel céramique recueilli en son sein. La Tène B ou C pourrait quant à elle être représentée par un bâtiment comportant au minimum sept poteaux, le tout circonscrivant un espace presque carré (6,70 x 5,90 m). Ce probable grenier pourrait en effet être daté entre 400 et 208 avant J.-C. d’après une analyse au radiocarbone effectuée sur des charbons de bois. La très grande majorité des vestiges reconnus appartiennent manifestement à un établissement rural vraisemblablement créé durant la seconde moitié du I er siècle de notre ère ou, plus probablement, au siècle suivant. La totalité des 10 bâtiments découverts sur cette emprise sont construits sur poteaux plantés. Leur taille est assez restreinte (entre 13 et 52 m2). L’espace semble gouverné par un système d’orientation assez strict (en moyenne 41° est/131° est), dont l’influence paraît effective aussi bien au niveau des édifices que des six clôtures identifiées au terme de cette campagne de fouilles. Cette orientation, mais aussi leur disposition et leur mode de construction, suggèrent un ensemble cohérent, qui pourrait appartenir à une même phase d’occupation. Nous nous heurtons toutefois ici à l’indigence du mobilier recueilli dans ces structures, qui ne nous permet pas, dans la très grande majorité des cas, de proposer une attribution chronologique précise. La fonction de ces bâtiments est difficile à renseigner au vu de l’état d’arasement prononcé des vestiges et du manque de mobilier caractéristique et discriminant. Aucun niveau de sol ou aménagement interne spécifique n’a par exemple été mis en évidence. Le plan de ces édifices pourrait par ailleurs être incomplet, d’une part car certains poteaux implantés superficiellement dans le sol ont pu disparaître en raison de l’important degré d’arasement constaté sur ce terrain, d’autre part car certains d’entre eux se trouvent près des bermes de l’emprise. Deux groupes peuvent toutefois être discernés. Le premier, représenté par trois exemplaires, renvoie aux habituels greniers sur plateforme surélevée. Le second groupe d’édifices se distingue par un plan plus allongé, à une seule nef, sans poteau faîtier, possiblement utilisé pour la stabulation. La plupart de ces constructions semblent s’articuler autour de plusieurs rangées de poteaux formant probablement deux enclos rectangulaires dont nous n’aurions que la portion sud-est. L’un d’entre eux au moins accueillerait un puits. De tels alignements de creusements laissent entrevoir l’existence d’espaces dédiés au parcage des animaux, et renvoient donc possiblement à une activité d’élevage. La découverte de bâtiments de stockage de type grenier mais aussi celle de trois « cabanes excavées » de dimensions très réduites dans la partie basse du site (2,45 et 2,51 m2 pour deux d’entre elles), conjuguée à l’existence probable d’enclos pour les animaux et à la nature de certains artefacts métalliques recueillis dans le comblement des structures (battant de sonnaille, lame de faucille, herminette, ciseau peut-être utilisé pour le travail de la pierre, ciseau possiblement pour celui du bois, clavette ou chasse de tailleur de pierre), dont certains – collectés dans le comblement d’un puits – témoignent d’une activité de forge (nombreuses scories, deux soies de préhension et un marteau), sont autant de témoins d’un contexte spécifiquement rural, dans un lieu tourné vraisemblablement vers les activités agricoles et artisanales. Cette probable pars rustica serait délimitée sur son côté sud-est par une longue clôture en bois se développant sur une longueur de 68,60 m au minimum. Aucun vestige de l’époque romaine n’a ainsi été mis au jour le long de l’actuelle rue du Moulin Chaudron. Il n’existe en revanche aucune limite matérielle du domaine sur le côté nord-est, en direction de la Barbuise.Parmi les structures mises en évidence sur ce site, on mentionnera une fosse vraisemblablement utilisée pour « éteindre » la chaux vive, appréhendée à quelques centimètres d’une des bermes de l’emprise. Rectangulaire à l’ouverture (1,10 x 0,88 m au maximum), celle-ci n’était conservée que sur 0,09 m de profondeur. La plus grande partie du remplissage, au centre, était composée d’un mortier jaune très clair, tandis que le pourtour du creusement était souligné par une mince bande brun sombre dans laquelle il faut sans doute voir les restes d’un coffrage en bois (des traces ligneuses sont nettement visibles sur les portions de chaux en contact avec ce liseré brun). 80 m au sud-ouest de cette excavation a notamment été trouvée une fosse large de 1,80 m, préservée sur 1,50 m de long, qui renfermait de nombreuses graines de céréales carbonisées (orge et blé principalement). Les parois de cette structure préservée sur 0,60 m de profondeur étaient manifestement doublées à l’origine par un dispositif en bois, dont certains éléments – carbonisés – étaient encore observables au moment de la fouille. Cette probable resserre destinée au stockage alimentaire, comblée vers le milieu du III e siècle après J.-C., a notamment livré plusieurs artefacts appartenant à l’équipement du cheval (appliques décoratives de harnais en alliage cuivreux et mors en fer). Ce creusement est recoupé par un axe de circulation traversant l’emprise de part en part sur une longueur de 38 m. Point de mise en œuvre complexe ici, puisque ces deux ornières sont installées directement sur le toit du substrat. On notera enfin la découverte de trois puits disséminés en plusieurs points de cette emprise, dont deux fouillés intégralement (3,95 m de profondeur pour l’un, 4,10 m pour l’autre). Aucune trace de cuvelage en pierre n’a été mise en évidence au sein de ces conduits circulaires. Les 13 fragments de planches récupérés à la base de l’une de ces structures, à partir de 3,60 m de profondeur, ont en revanche pu appartenir à une infrastructure quadrangulaire en chêne. Leur état de conservation est considéré comme mauvais, si bien qu’il a été impossible de repérer d’éventuelles traces de travail. L’un de ces éléments, qui avait conservé une partie de l’aubier, a toutefois fourni une date d’abattage en 204 après J.-C. (à plus ou moins 10 ans). La phase 2 de cette fouille nous permettra ainsi de compléter le plan de ce probable établissement, qui pourrait être doté d’une cour selon le responsable de l’opération de diagnostic. De là à penser que cette cour puisse marquer la transition entre la partie productive et un secteur résidentiel potentiellement représenté par le bâtiment « en dur » identifié en 2017, il n’y a qu’un pas, que nous ne franchirons toutefois pas ici, au vu de la modestie des données collectées à ce stade de l’étude. Si cette structuration s’avérait bipartite, avec une séparation nette opérée au moyen d’une cour entre, d’une part, une partie résidentielle caractérisée par un bâtiment à fondations massives, d’autre part une pars rustica comportant des bâtiments sur poteaux plantés, cette installation pourrait probablement être rangée parmi celles de catégorie supérieure, tranchant en cela avec la modestie de la très grande majorité des établissements antiques étudiés autour d’Augustobona (Troyes). Cette opération devrait également nous permettre de vérifier si ce probable établissement a bien été abandonné durant la seconde moitié du IV e siècle de notre ère et si le mobilier appartenant à cette période atteste d’une occupation continue dans le temps ou plutôt d’une restructuration tardive de faible amplitude. Cette phase d’occupation sera à examiner avec attention, le nombre d’installations de l’Antiquité tardive fouillées sur le territoire des Tricasses restant à ce jour relativement faible. |
Mots-clés (sujet) | Fosses de piégeage pré- ou protohistoriques ; sépultures du Bronze final ; fosse d’extraction du Hallstatt ; bâtiment sur poteaux de La Tène ; établissement rural de l’époque romaine (bâtiments sur poteaux, clôtures, fossés, axe de circulation, cabanes excavées, cellier, fosse pour la chaux et puits) |
Mots-clés (période) | Bronze final, Hallstatt, La Tène, époque romaine |
Mots-clés (géographie) | Grand Est, Aube, Charmont-sous-Barbuise |
Accès au document
Référence bibliographique
Cartron
2021 :
CARTRON (Gaël) dir.
— Charmont-Sous-Barbuise (10)
Rue Du Moulin Chaudron,
Phase 1. Rapport final d'opération archéologique, Service régional de l'Archéologie Grand Est. Limoges : Éveha, 2021.